La numérisation appliquée aux collections musicales ?

  • Par administrateur
  • 20 juin 2006
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Synthèse de Pascal Cordereix

Après les musiques électroniques le vendredi après-midi, le samedi matin offrait une perspective plus mémorielle et patrimoniale autour de la question de : “ La numérisation appliquée aux collections musicales ? De la valorisation des collections patrimoniales (collectage, fonds historiques) à la consultation permanente d’une collection de prêt. Enjeux, avancées et limites ”.

(Excusé : Yann Legall de la Médiathèque de Biarritz)

Représentatives de l’éclectisme musical de cette région, deux des plus importantes associations de collecte du patrimoine musical de tradition orale de l’Ouest, l’Arexcpo en Vendée et Dastum en Bretagne sont venues présenter la manière dont elles oeuvrent à la sauvegarde, la diffusion et la valorisation de ce patrimoine.

AREXCPO

L’AREXCPO [Association de recherche et d’expression de la culture populaire en Vendée], représentée par Jean-Pierre Bertrand

Créée au début des années 1970, l’Arexcpo offre à ce jour à la consultation plus de 8 000 extraits musicaux, 17 400 extraits parlés, près de 68 000 images fixes… Pour des raisons déontologiques, en dehors des emprises de l’AREXCPO, ce sont donc des extraits sonores qui sont consultables.

A l’origine, la base documentaire a été constituée à partir des préconisations de la FAMDT [Fédération des Associations de Musiques et de Danses Traditionnelles, http://mondomix-planet.com/productions/famdt/htdocs/index.php ]et de l’AFAS [Association Française des détenteurs de documents Audiovisuels et Sonores, http://afas.imageson.org/ ], mais s’en est écartée par la suite sur certains points.

Elle est aujourd’hui conçue en association avec des chercheurs du Lacito, laboratoire du CNRS. Un des concepts d’élaboration vise notamment à un rapprochement dans le temps entre textes, chansons inédites… Dans cette perspective, la base permet un lien entre l’œuvre collectée et l’œuvre de référence, ceci notamment parce qu’ont été intégrées à la base les références des catalogues Coirault* et Laforte**.

- Coirault, Patrice, Répertoire des chansons françaises de tradition orale, Paris, BnF. 2 vol. parus. Vol. 3 à paraître en 2006

- Laforte, Conrad, Le Catalogue de la chanson foklorique française, nombreux volumes parus à partir de 1958 aux Presses de l’Université de Laval (Québec).

Un des objectifs de l’AREXCPO est de décloisonner les pratiques et les publics, en s’adressant aussi bien aux musiciens en quête de répertoires qu’aux familles elles-mêmes ou aux chercheurs.

A noter que l’AREXCPO poursuit également une politique éditoriale intéressante avec la publication d’une collection de disques compacts des collectages réalisés par cantons vendéens.

DASTUM

DASTUM [en breton : recueillir, rassembler], représenté par Jean-Luc Ramel, Dastum-Rennes

Créée en 1972 (en 1992 pour Dastum 44), la phonothèque de Dastum est riche de plus de 30 000 documents sonores (auxquels il faut ajouter une photothèque de 25 000 documents…). La base documentaire, elle, comprend à l’heure actuelle 37 000 fiches, avec une perspective de 50 000 fiches dans les mois qui viennent (pour des raisons de serveur).

Du son est associé à la plupart de ces fiches. Fonctionnant en réseau, les morceaux peuvent être écoutés en intégralité dans un certain nombre de centres DASTUM, en fichiers MP3. Pour une meilleure accessibilité, DASTUM travaille à générer des fichiers MP3 directement attachés à la base documentaire. Deux jeux de sauvegarde sont réalisés : une copie non compressée, une copie sur exabyte.

Au delà de ses centres, DASTUM a considéré que le grand public n’avait peut-être pas besoin d’avoir accès à 50 000 documents d’archives, mais que par contre, il avait besoin d’un outil d’appropriation de ce patrimoine sonore, d’où la mise en place sur le site Internet de DASTUM d’un panorama de la musique bretonne et du patrimoine oral qui en permet la découverte à travers une sélection de documents, commentés, contextualisés…

Aujourd’hui, DASTUM cherche à densifier le réseau de consultation de ces archives. Néanmoins les questions de déontologie de cette consultation restent prégnantes, et le respect du travail des collecteurs comme des interprètes est une priorité.

Après le patrimoine sonore inédit, retour au disque édité avec le projet de numérisation de 78 tours de la Médiathèque musicale de Paris. Numérisation opérée ici dans un but de diffusion et de valorisation, non de conservation.

Médiathèque musicale de Paris, représentée par Gilles Pierret

Numérisation prévue cette année

  • Contexte particulier :
    • MMP = Bibliothèque publique
    • Mais avec mission de conservation : disques édités uniquement (pas d’inédits)
    • La collection la plus importante : les microsillons
    • La MMP récupère les fonds des discothèques parisiennes + le fonds de la Discothèque de France (40 000 vinyles)
    • Mission élargie au CD = acq. pour conservation : 3 à 3 500 CD acq./an
    • Microsillons : 90 000
    • CD : 40 000
    • 78 tours : 5 000
    • Mission de mise à disposition au public
  • Pourquoi numériser les 78 tours
    • Fonds à taille humaine
    • Libres de droits (globalement)
    • Supports fragiles en terme de consultation
    • Valorisation du fonds
    • Dynamique du pôle associé avec la BnF
  • Facteurs favorables :
    • Informatisation des bibliothèques de la Ville de Paris
    • “ Patrimoinialisation ” de l’établissement
    • Au niveau des professionnels : la MMP = un des rares lieux de lecture publique qui soit lieu de conservation de documents sonores édités
  • Difficultés :
    • Difficulté à intégrer les documents sonores dans une chaîne de numérisation
    • Problèmes de droits
  • Problématique :
    • Sélection à faire : choix de 3 500 d. 78 tours sur 5 000
    • Réflexion sur les publics
    • D’où une phase d’étude de faisabilité technique : tests sur un échantillon représentatif
  • Pour qui numériser, comment numériser ?
    • Large public
      • “ Nettoyage ” (restauration) poussé, l’audibilité prime sur la fidélité
      • Format de compression : Ogg Vorbis (logiciel libre) (http://www.vorbis.com/)
      • Poste de consultation : poste simple
    • Public plus spécialisé
      • Pas de “ nettoyage ” (restauration) des disques
      • Format de compression : FLAC (Free lossless audio codec, logiciel libre) (http://flac.sourceforge.net/ )
      • Poste de consultation : poste multimédia

En conclusion rapide

- Importance du traitement documentaire pour les deux associations de collecte du patrimoine oral. Ce n’est pas un hasard si l’une et l’autre ont choisi d’introduire leur exposé par une présentation de leur base documentaire ;

- Importance également des questions de déontologie de consultation (qui ne sont pas que les seules questions juridiques) avec un double niveau d’accessibilité : “ réservé ” (réseau) et grand public ;

- Question de la numérisation et de la pérennisation de cet archivage numérique pour les deux structures dont le statut associatif peut fragiliser cet archivage à long terme : question de coût, de maintenance… ce qui amène à la :

- Question des choix de numérisation : les deux associations font le distinguo entre une copie de conservation en format Wave non compressé, et une copie de consultation compressée (en MP3) ; la Médiathèque musicale de Paris, a, elle, opté pour deux copies compressées, l’une sans perte (mais néanmoins compressée), l’autre, “ dégradée ” (Ogg Vorbis) ;

- Face à ces choix, il n’aurait pas été inutile d’avoir un contrepoint de présentation des préconisations internationales (IASA, http://www.iasa-web.org/ ) et nationales (AFAS, http://afas.imageson.org/ ; BnF, http://www.bnf.fr/ ) en matière d’archivage numérique pérenne du son.